Hors série

©s.Touneur Phéline Etait-ce un jeudi ? J’ai beau changer le disque, je n’ai plus la force de résister à l’ordre immuable d’un nouveau rituel auquel ma solitude me soumet. Entre le salon et la terrasse, je vais et je viens. J’allume tout en même temps sur mon passage : un clope, l’ordinateur, une lampe, l’ampli de la chaîne Sony. Je tire sur ma lucky strike, je m’assieds et je pose mes mains sur la grande table. olixar iphone 8 case Je tâtonne à la recherche de ce que j’ai perdu. Je change le disque et je clique sur l’icône “game” aux premières mesures de l’opéra. Roi, dame, valet. Au jeu électronique, j’excelle à monter les as : rapidité, combine, ruse. iphone 7 red battery case Rouges, noires, les cartes tombent. Je relève haut la main le défi du score de la partie précédente affiché en haut de l’écran. J’accumule les points en un temps minimum. Au terme de la scène 3 d’ Orphée, j’écrase mon mégot et je reprends en chœur : …Accablé de regrets / Je parcours les forêts / La vaste enceinte / Touché de mon destin / Echo répète en vain / Ma triste plainte. La nuit tombe en plein jour. Tant qu’il s’agit de jouer en solo, je mets tout le monde minable derrière moi ! Devrais-je y voir un fait du hasard ou simplement considérer qu’à force d’habitude, je me suis fait la main à la solitude ? La vérité, c’est que lorsque le jeu s’achève et qu’il faut faire “pour de vrai”, il semble qu’Echo fasse la sourde oreille, me laissant à la traîne, pantelante devant un tabernacle plein de moi-même. Livrée à moi-même, au risque de me rencontrer pour de bon et de ne pas en réchapper. d3o iphone 8 case Moi, commun des mortels qui n’ont rien de l’étoffe des héros. Rien d’un David face à Goliath. Les masques tombent devant l’adversaire, plus tentaculaire que l’hydre protéiforme dont je ne doutais pas au temps de l’enfance que l’on puisse l’exterminer rapido. Normal, puisque Hercule l’avait fait ! Métonymie amphigourique ou métaphore bafouillante ? J’invoque n’importe qui, j’invente n’importe quoi pour me mettre en garde contre les écueils et les méfaits du solipsisme pratiqué à haute dose. Pour les autres, je serai plus empirique : la solitude – du latin solitudo, solus, – c’est quand on est seul ! Pour dire autrement le sentiment qui s’est substitué à l’état dont, un moment je me réjouis, je devrais accrocher à ma phrase une kyrielle de synonymes qui sonneraient creux comme un gong maladroitement fondu : lassitude, ennui, morosité, monotonie. cork iphone 7 plus case Dans un ultime sursaut, sur la dernière page de mon cahier “main courante”, je fais genre et je trace : F. A. T. I. G. U. É. E. … Une lame qui transperce l’omoplate. La brûlure qui s’enroule sous le sein, la douleur qui s’entortille sous la peau comme les vrilles des courges bedonnantes qui asphyxient les pousses vives des heliconia. La cage thoracique s’enflamme. Le souffle se raréfie, sur le point de s’interrompre sous l’étreinte délétère. Les spasmes et les contractions de l’estomac refluent jusqu’à la gorge nouée de hoquets. Le corps ankylosé, bée jusqu’au plus intime de ses anfractuosités, de ses mystères et de ses secrets. Solitude du corps. Il n’y a plus de décalcomanies ni de coloriages le matin au lever du jour. Mes lèvres closes me renvoient dans ce mouvement immobile à ma seule présence. La colle sèche derrière les post-it des petites joies et des minuscules bonheurs de midi, usés jusqu’à la trame. Les inserts des heures chaudes se font la malle en vagissant à l’idée d’être validés : no enter. Les apostilles lunaires, enluminées de nacre et d’ivoire se désagrègent dans les reflets de la silhouette gibbeuse de l’astre qui se pointe, sans surprise, avec la ponctualité des geôliers à l’heure de la relève. L’imprimante s’étrangle et régurgite dans un rot aigre et sonore le galimatias vespéral qu’on aurait voulu lui faire avaler. Solitude des mots. Je ne distingue plus les ombres. Statiques, acérées, elles empalent l’air. Sur la terre glabre, leurs contours hiératiques et aphasiques passent leur chemin en silence. La lumière zénithale se prend les pieds dans son long voile de veuve outragée par l’insolence et l’arrogance de Messire Soleil qui tente d’attirer l’attention sur les rayons qu’il a pris le plus grand soin de peigner, en catimini, au dessus des volcans. Solitude des songes. Mes chimères, emmaillotées dans la camisole du temps, reposent dans le reliquaire profané par les iconoclastes. Hier, aujourd’hui, demain. Pensées prises aux pièges dans les rets inextricables des heures. Lentes et lourdes heures qui piétinent et trépignent au seuil d’un dénouement différé dans l’instant qui prend des airs méprisants d’éternité. Au cou gracile des illusions et des mirages, un jonc d’argent gravé aux armes de la tortionnaire ; à leurs chevilles, qui jugule leur course, le lien tenu et imputrescible du temps mortifère. Solitude des rêves. Et si c’était pas un jeudi, mais un lundi… c’est tant pis.

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